Depuis plusieurs mois je vois passer plusieurs publications de personnes démunies qui ne savent plus comment réagir parce que leur chiot n'est pas du comme ils l'avaient imaginés. Passons outre le physique, c'est plutôt sur le plan de l'apprentissage que ça pose problème. Le chiot est trop dissipé, incapable d'apprendre un ordre, une situation, à se retenir etc et pour les nouveaux maitres c'est pire qu'une claque, c'est le sans cesse : suis-je à la hauteur pour épanouir ce chien là ? Avec toutes les interrogations négatives qui vont avec. Le cerveau humain augmente de façon non- rationnelle les comportements de nos animaux, nous laissant nous débattre avec la culpabilité de n'avoir pas adopté le bon chien.
Adopter un jeune animal nécessite de lui donner les repères nécessaires pour qu’une bonne éducation puisse se faire. Le laisser grandir, évoluer et murir A SON RYTHME (et non au votre) au tempo d’un apprentissage positif qui fera de votre loulou un super adulte.
C’est loin d’être inné tout cela. C’est uniquement de l’acquis qui passe par la cohérence, la régularité la douceur du maitre et son exigence vis-à-vis de son nouvel ami.
Demander à un chiot de deux mois d'arrêter de mordiller du jour au lendemain n'est pas compréhensible pour l'animal. Un chiot, c’est un petit animal qui ne demande qu’à découvrir et explorer le monde qui l’entoure. Si les humains savent se servir de leurs mains pour percevoir les objets les entourant, le chiot n’a que sa gueule pour appréhender toutes ces nouvelles choses qui peuplent son environnement. Alors oui des fois ça dérape et le maitre retrouve des affaires déchirées, des murs troués quelques fois, des mains mordillées et diverses bêtises mais cela ne doit pas le conduire à juger qu'il est incapable de s'occuper de son chien. Cela doit le conduire à se demander quels seraient les meilleurs jouets/stimulateurs pour le détourner et que peut-il mettre en place pour empêcher cela ? Est-il suffisamment motivant pour que son chiot accepte de laisser l’objet du désir pour aller voir l’humain ? Pleins de questions comme cela qui doivent vous inciter à revoir la relation que vous avez avec votre animal, à vous remettre en question afin que lien qui vous unisse soit le plus fort possible.
Mordiller c'est instinctif chez l'animal et l'on sait que tout ce qui est instinctif c'est le plus difficile à travailler. Cependant, je vous rassure qu'il existe des méthodes toutes bêtes, toutes simples pour que vous puissiez conserver vos mains et les objets auxquels vous tenez ! :D Investissez dans des jouets stimulants, qui font pouic, qui roulent selon ce que votre animal aime. Investissez dans de supers friandises méga-appétente (morceaux de poulet, dés de jambon, cubes de gruyères etc) pour devenir bien plus motivant que l'objet qui interpelle votre chien. Devenez un expert de l'ignorance, apprenez lui le schéma suivant : tu mordilles, j'essaie de te détourner avec des jouets / friandises, tu continues à me mordiller plus fort, je te demande un "doucement" , tu continues de mordiller, je cesse toute interaction avec toi et ne revient vers toi que lorsque ta phase d'excitation s'est calmée bref apprenez à voir la vie avec ses yeux à lui et à découvrir le stimulant qui lui fera lâcher toutes les autres stimulations (plus ou moins difficiles à découvrir selon le tempérament de nos animaux).
Il est difficile de baisser notre degré d’exigence parce que l'humain a tendance à transposer ses désirs à son chien sans forcément se demander si son chien est dans la capacité d'y répondre correctement. Si depuis toujours on a rêvé, pensé, idéalisé que notre chien sera un cador de l'agility et que, manque de pot, c'est une discipline qui ne plait pas du tout à notre chien, la déception se fait alors fortement sentir. Nous regrettons parfois ce chien qui ne correspond pas à nos attentes et avec qui tous les projets sportifs, éducatifs, s'effacent parce que le sport c'est pas son truc, parce que les tours c'est pas son truc et nous finalement on se demande : mais est-il fait pour moi ? La réponse, sauf cas-extrême est oui. Apprenez à trouver LE sport qui le comblera, l'activité qu'il adorera, le jeu qu'il vénèrera, ce n'est pas grave si votre chien n'aime pas le cani-vtt, peut être sera t'il un prodige des jeux de réflexions mentaux ? Reprenons l'exemple du mordillement (que vous pouvez transposer au chien qui saute, qui aboie etc). Récompensez le plus possible votre chien quand il ne vous mordille pas, quand il est calme afin que dans sa tête l'équation suivante soit la plus claire possible :
* Je suis calme dans les interactions avec mes maitres = je reçois des récompenses qui me motivent à reproduire ce comportement
* Je ne suis pas calme dans les interactions avec mes maitres = je ne reçois pas de récompenses et je n'ai plus l'attention de mes maitres.
Apprenez à baisser votre niveau d'exigence et à récompensez votre chien dès qu'il arrête, ne serait-ce, que d'un quart de seconde de vous mordiller. Ne lui demandait pas d'arrêter d'utiliser sa gueule et ses dents du jour au lendemain, mettez simplement des limites à ses mordillements. Au début des limites adaptées à sa compréhension (par exemple récompensez quand il ne mordille plus pendant une seconde) puis augmentez peu à peu le degré de l'exercice tout en n'hésitant pas à le redescendre si votre animal bloque ou ne comprend plus. Chez certains individus tout va très rapidement, chez d'autres c'est plus tardifs mais cela ne doit pas vous faire baisser les bras. Si vous êtes réguliers et cohérents dans votre démarche votre chien finira par comprendre l'exercice.
Il est difficile d’abandonner son regard humain et de plonger, corps et âme dans celui du chien. Essayer, pour quelques minutes, de vous mettre à sa place. Tentez de voir le monde comme le perçoit votre ami canin. Rien ne vous saute aux yeux ?
L’exigence humaine peut être ?
Il est clair que bon nombres de propriétaires de chiens sont bien trop exigeants avec leur animal, proposant des exercices au-delà de leur capacité. Parce que oui demander à un chiot de se retenir dix heures, c’est lui demander un exercice qu’il est incapable de réussir parce qu’il n’a pas les codes (physiologiques et d’apprentissage) pour le maitriser, c’est le mettre en échec et retarder la bonne maitrise de la propreté.
D’autres diront que la propreté dépend de l’âge, de l’éducation mise en place, je rajouterai qu’elle diffère également des individus canins. Certains seront plus réactifs, comprendront rapidement que les besoins se font dehors, pour d’autres ce sera plus tardif. Est-ce une raison suffisante pour estimer que votre chiot n’a pas sa place chez vous ? Parce qu’il n’est pas propre ? Et votre bébé humain alors, il n’est pas propre non plus, est-ce que ça doit vous conduire à l’emmener à l’orphelinat ? J’espère bien que non parce que sinon l’espèce humaine est mal-partie pour survivre encore quelques siècles !
A la maison, Voulka dès son adoption (trois mois) a été très propre, aucun oubli dans la maison. Tous les besoins en extérieurs et avec une très bonne maitrise.
Toundra, à son adoption (un peu plus de deux mois) n’était pas propre. Cela a duré quelques temps, je ramassais régulièrement quelques oublis. La propreté était acquise à 98% mais les pourcents qui nous restaient à accomplir se faisaient attendre. Loin de cataloguer ma chienne dans le : pfff qu’elle imbécile de chienne, à six mois elle n’est toujours pas propre, je me suis demandée qu’est ce qui l’empêchait de faire dehors dix fois sur dix ? Et la réponse vint naturellement : moi. C’est à moi de prévenir ces incidents, c’est à moi de la mettre en situation de réussite en la sortant encore plus régulièrement, c’est à moi de réagir au quart de tour dès qu’elle amorce un couinement. Je dois prendre en compte sa capacité à se retenir, et que diable si elle est bien inférieure à celle de Voulka au même âge ! Toundra c’est Toundra, Voulka c’est Voulka et elles sont incomparables.
L’exigence humaine, elle est dure à contrôler, difficile à diminuer parce que notre chien on veut qu’il soit PARFAIT alors on augmente la difficulté des exercices sans nous demander, encore une fois, si notre chien est capable de répondre à notre demande !
Je suis désolée de détruire un mythe mais le chien parfait n’existe pas. Votre chien, quel qu’il soit, aura toujours SES qualités et SES défauts et c’est cela qui fait qu’il est UNIQUE. Quelle douleur cela serait d’avoir que des chiens parfaits ! Apprenez à le concevoir, à mettre de côté ce portrait idéalisé de votre chien, apprenez le à l’aimer LUI pour ce qu’il est et pas pour ce que vous voudriez qu’il soit ! Que diable si c’est un chien aboyeur ,destructeur, indépendant, n’aimant pas les câlins, que diable si c’est un chien très collant, glouton, brusque, que diable si c’est un chien non propre, réactif, hyperactif, … que diable tout cela. Tout ce travaille et même si votre chien ne sera jamais parfait à 100% quel bonheur cela serait de flirter avec les 95% ! et, là où c'est beau c'est que c'est plus que possible !
Pour aller encore plus loin, actuellement et après une longue réflexion, je me rends compte que j’aime mes chiennes pour leurs « défauts » que je mets d’ailleurs entre guillemets car pour moi ce ne sont pas des défauts, ce sont simplement ce qui les rend spéciales, uniques.
Parce que ma Voulka c’est ce côté obstinée et gloutonne qui la caractérise, parce que ma Toundra c’est le fait d’être indépendante et de renier la légende comme quoi un berger est pot de colle avec son maitre ! et c'est certainement ce qu'il me restera quand elles partiront. Je me rappellerais sûrement, avec des larmes dans les yeux, de la gourmandise obsessionnelle de Voulka, de Toundra et de son terrier dans lequel elle passe une bonne partie de la journée parce que j’ai appris à aller au-delà de ce chien parfait, parce que j’ai appris à les aimer pour ce qu’elles sont, et pas pour ce que je voudrais qu’elles soient. Ainsi Voulka avec qui je rêvais de faire des centaines de kilomètres en cani-trottinette s'avère plutôt une chienne douée à l'agility, au shapping, et aux jeux de réflexions. Toundra avec qui je voulais travailler en cours d'éducation est finalement une chienne plus motivée par la trottinette, activité dans laquelle elle donne 100% de son investissement. Passé le cap de la déception, tout humain que nous soyons voulons le bonheur de notre chien et tant pis s'il faut mettre de côté nos rêves, tout ce qui compte à cet instant précis c'est l'épanouissement de notre chien, apprendre à le connaitre, apprendre à évoluer humainement et caninement au sein d'une relation truffée de jeux, d'activités, de sports qui embellissent la vie de notre ami à quatre pattes.
Apprendre à les aimer avec justesse, tendresse, énormément et simplement. Ne pas regarder derrière mais plutôt discerner le chemin qui s’ouvre devant nous. Vouloir l’arpenter avec notre nouvel ami, malgré les embuches qui se placeront sur notre chemin. La vie avec un canin, ce n’est pas du tout cuit, la vie avec un canin c’est un apprivoisement perpétuel de ce chien qui parcourt un bout de route avec nous, la vie avec un canin c’est incertain, c’est fait de hauts et de bas et c’est ce qui la rend si belle.
Cessez de les idéaliser, de leur proposer des exercices qui vont au-delà de leurs capacités, aimez les pour ce qu’ils sont, votre relation n’en sera que plus belle.
Et à ce moment là, quand votre "exigence" sera en totale symbiose avec la capacité d'apprentissage de votre chien, alors vous découvrirez votre chien Parfait parce que vous aurez appris à l'aimer pour ce qu'il est.